J'hypokâgne, ils hypokhâgneront...
J'ai rêvé (de) l'hypokhâgne, pendant longtemps. J'ai idéalisé l'hypokhâgne, longtemps aussi. J'ai aimé passionnément des ex-hypokhâgneuses. Je m'étais préparée psychologiquement à la prépa.
Et puis, j'y suis entrée.
J'ai pleuré, deux fois par semaine et pendant des heures le week-end. J'ai aimé, sept jours sur sept. J'ai appris, quotidiennement. J'ai découvert, tout le temps. J'ai dansé, chaque veille de vacances. J'ai fait des bêtises, souvent. J'ai travaillé, tantôt trop, tantôt pas assez. J'ai été fatiguée, la plupart du temps. J'ai ri, tous les jours.
Il ne me reste que cinq mois d'hypokhâgne. Demain, c'est la JPO. Journée Portes Ouvertes. Demain, je vais vieillir, je le sais. Demain, je serai parmi "celles qui savent". Celles qui ont "survécu", aux yeux des "petits" terminales. Pourtant, je ne crois pas qu'on survive à la prépa. Je, le moi de terminale, n'a pas survécu à la prépa. J'en ai pris conscience il y a peu. Je n'ai plus de côté "léger". Je ne dis plus "miaou". Je ne dis plus "bonjour" aux passants. Je ne cours plus dans les escaliers. Je rougis de ma maladresse. Je ne fais plus "mes grands yeux". Je ne pleure plus devant "tout le monde". Je ne saute plus dans les flaques d'eau. Je ne sors plus sans parapluie. Je ne veux plus "perdre de temps". Je lis "utile" (et j'en ai honte). Je ne fais plus "apfffffff" quand quelque chose ne me plaît pas, je fais, c'est tout. Je ne râle plus ou alors seulement devant les gens qui me sont proches. Je ne regarde plus Mary Poppins. Je dors sans peluche. Je ne sais plus dire que j'aime quelque chose ou quelqu'un.
Je n'aime pas tout ça. Demain, je ne sais pas ce que je dirai aux futurs hypokhâgneux. Sûrement que ce n'est pas si difficile qu'on le dit, que c'est très chouette, que le lycée est très bien. J'y crois. Mais j'aimerais bien être comme eux. Rêver de la prépa. Il faudrait peut-être que je leur dise....le plus beau moment dans la prépa c'est celui où on rêve de la rejoindre.